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La Rose dans la vallée
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7 juin 2022

Non, Emmanuel Macron, il n’y a pas d’«humiliation de la Russie», il n’y a que des morts inutiles

Les propos du Président dans la presse régionale, préconisant d’éviter une «humiliation de la Russie», sidèrent au regard de la réalité d’un Vladimir Poutine semant la désolation en Ukraine et causant le malheur des deux peuples.

par Sonia Delesalle-Stolper

publié le 5 juin 2022 à 14h42

Quelle est cette obsession d’Emmanuel Macron ? Sur le risque d’une «humiliation de la Russie» ? Pourquoi cette lourde, trop lourde, insistance ? Dans une interview fleuve à la presse régionale pour ce long week-end férié, le président français a jugé bon de réitérer cette crainte, tout en parlant d’«erreur stratégique» de Vladimir Poutine.

Il n’y a pas d’«erreur stratégique». Il y a des morts inutiles, tous les jours, côté ukrainien et côté russe. Il y a des destructions incessantes. Il y a la volonté assumée, depuis des années, d’annexer un pays frère indépendant, d’en gommer l’identité, d’en éliminer les ressortissants. Il n’y a pas d’humiliation. Il y a des tués. Tous les jours, toutes les heures. Depuis 102 jours. Des jeunes, des vieux, des femmes, des hommes et des enfants.

Le président Macron, adepte des gestes forts, si attaché aux symboles, n’a toujours pas daigné montrer son nez à Kyiv. Il est l’un des rares dirigeants européens à ne pas s’être déplacé en Ukraine. Sa toute nouvelle ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, a semble-t-il pris la mesure de ce manque et s’est rendue dans la capitale ukrainienne à peine nommée. Histoire de resserrer les liens, de répéter la solidarité et renforcer l’aide de la France à l’Ukraine. Le geste était significatif, il a été apprécié à Kyiv.

Mais Emmanuel Macron préfère rester à Paris. En revanche, sur Twitter et dans des trailers dignes de la pire production Netflix, il se montre volontiers, bronzé et en bras de chemise, l’air pénétré du leader en proie à de terribles atermoiements, la main pressée sur son front si plein, le sourcil froncé face à la gravité du moment. Mais il n’y a pas d’atermoiements. Après Boutcha ? Après Borodyanka ? Marioupol ? Kharkiv ? Kherson ? Sievierodonetsk ?

Il n’y a pas d’humiliation. Il y a un Vladimir Poutine qui se fiche d’Emmanuel Macron. Qui se fiche de tout et de tous, des remontrances comme des discussions diplomatiques. Et ce depuis des années. Humiliation ou pas, le dirigeant russe poursuit son objectif. Tuer, éliminer, asservir, annexer. Il a d’ores et déjà propagé une telle haine entre Ukrainiens et Russes qu’il faudra des années, peut-être des générations, pour espérer réparer cette blessure. Il tue les Ukrainiens et il tue son peuple, les Russes, en les utilisant comme chair à canons mais aussi en les isolant, en les appauvrissant, en les privant d’un avenir libre et pacifique. Il n’y a pas d’humiliation pour un homme qui, depuis vingt ans, entraîne son pays dans des guerres sanglantes. Qui empoisonne ses ennemis, sans le moindre scrupule, la moindre crainte d’humilier les pays sur le sol desquels ses agents dispensent tranquillement leur sale boulot.

Pourquoi cette insistance du président français ? A quoi sert-elle ? A ménager l’allié allemand, lui aussi empêtré dans ses contradictions héritées d’années de complaisance vis-à-vis du pouvoir russe ? Oui, si cette guerre se termine un jour, il faudra trouver comment reconstruire la paix. Mais on en est encore très loin. En attendant, Poutine a encore proféré dimanche des menaces, encore envoyé des bombes, encore tué.

Avec ses propos, Emmanuel Macron, président européen, passionné par le renforcement de l’Union, provoque une division de plus en plus marquée, en s’attirant les foudres des Européens de l’Est qui, eux, ont vécu sous le joug soviétique, qui ont connu dans leur chair l’écrasement des libertés. Certains parlent de propos destinés à une audience domestique, en lien avec les élections législatives. Si c’est le cas, c’est encore pire. Et c’est raté, tant ces mots ont une résonance à l’étranger, et pas seulement en Ukraine.

A force de vouloir ménager la chèvre et le chou, à force d’espérer être le «sauveur», le «rassembleur», celui qui aura réussi à faire plier Poutine, Emmanuel Macron s’enfonce. Comme l’a dit le ministre ukrainien des Affaires étrangères, l’humiliation n’est pas du côté russe.

 

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